Article 1 de la CEDH : Évolution et extension du principe de juridiction

I. Portée des obligations en vertu de l’article 1 de la CEDH

Texte : « Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I »

Deux notions clés

- Toute personne : Protection universelle, sans distinction

- Juridiction : Notion autonome, dépasse la simple territorialité

II. Évolution jurisprudentielle de la notion de juridiction

A. Juridiction principalement territoriale

- Principe de base : compétence territoriale de l’État

Bankovic c. Belgique (2001)

approche
restrictive de l’article 1 : la
juridiction est principalement
territoriale. Elle exclut
l’applicabilité automatique de la
Convention dès lors que les États
n’ont ni contrôle territorial, ni
lien juridique étroit avec les
victimes

B. Extension extraterritoriale de la juridiction

1. Actes ayant des effets hors du territoire

- Soering c. Royaume-Uni (1989)

- Notion de victime potentielle

- Extradition = responsabilité du RU

2. Actes d’un autre État non-membre

- Pellegrini c. Italie (2001)

- Exequatur d’une décision du Vatican

- Italie responsable pour avoir validé une décision contraire à la CEDH

3. Perte de contrôle d’une partie du territoire

- Loizidou c. Turquie (1995) : contrôle effectif = responsabilité

- Assanidze c. Géorgie (2004) : autorité affaiblie ≠ irresponsabilité

- Ilascu c. Moldova et Russie (2004)

- Double responsabilité : Moldova (territoire national) et Russie (soutien actif)

4. Agents de l’État agissant à l’étranger

- Medvedyev c. France (2008)

- Contrôle d’un navire en haute mer

- Notion de juridiction fonctionnelle : contrôle total = juridiction

III. Opérations militaires à l’étranger

A. Al-Skeini c. Royaume-Uni (2011)

- Contrôle individuel par l’armée britannique en Irak

- Introduction du contrôle effectif sur les individus

B. Jaloud c. Pays-Bas (2014)

- Contrôle militaire d’un poste routier

- Obligation de respect des droits (article 2)

C. Conséquences de ces décisions

- Élargissement de la notion de juridiction

- Responsabilité partielle en contexte militaire

- Obligation minimale : droits fondamentaux (articles 2 et 3)

IV. Décisions administratives à l’étranger

A. MN et autres c. Belgique (2020)

- Refus de visa humanitaire en ambassade

- Pas de juridiction sans circonstances exceptionnelles

B. Enfants de djihadistes français en Syrie

- Nationalité ≠ juridiction

- Pas de contrôle effectif

- Ouverture possible via article 3 §2 Protocole 4 (droit de retour)

V. Conclusion

- De la territorialité stricte à une logique fonctionnelle

- Extension par la jurisprudence

- Responsabilité conditionnée au contrôle effectif (territoire ou individus)